Attachements tressés

Je me souviens que la première fois que j’ai rencontré Attandi, elle m’a parlé de son projet de mémoire de diplôme consacré au rapport au soin qu’entretiennent les femmes noires. Quelques semaines plus tard, nous nous sommes retrouvés en matinée dans un café parisien. Nous avons sans doute attendu longtemps ce jour-là avant  d’être servi, sans doute plus longtemps que d’autres clients. Mais en réalité je n’ai gardé aucune sensation de cette attente. Car si je dois me  rappeler  de mon expérience de ce moment, elle ne se situe pas dans l’attente d’un petit déjeuner dans un café parisien, mais dans cet espace-temps que nos échanges ont fait émerger à la manière d’un tendre voile nous enveloppant et protégeant du reste. J’ai repensé à ce moment en découvrant Braid me, à cette potentialité qu’ont les moments entre femmes noires d’engendrer des espaces-temps propice à l’expérience d’une hétérotopie féminine noire.  Braid me est une performance et série photographique qui met en scène deux jeunes filles, l’une avec une longue tresse inachevée et l’autre à l’extrémité qui natte. Selon l’angle de prise de vue, la première apparaît seule, assise sur ce tapis avec cette tresse sans fin. Elle m’évoque l’image fantastique et sonore  qui s’était créée dans ma tête quand  Attandi m’avait raconté toujours dans ce café de notre deuxième rencontre en me montrant ses longues et fines tresses  les réaliser seule. You know this hair is my shit/Rode the ride, I gave it time/But this here is mine. Le résultat d’un long chemin encore en cours et souvent difficile de réappropriation du soin de ses cheveux libéré du regard de l’autre, des mains qui font mal, et des  standards de beauté occidentaux. Rode the ride, I gave it time. Il y a une certaine ambigüité qui travaille Braid Me, entre le désir de prendre soin de soi individuellement et collectivement, mais également cette sensation d’une captivité à travers cette tresse sans fin qui semble la retenir. Ces attachements tressés qui nous relient à notre passé, que l’on tente de dénouer, afin de leur donner une forme de vie nouvelle se retrouvent également dans son travail Crochet me. Les cheveux regorgent ici d’histoires intimes et souvent silencieuses de désirs, révoltes et communions de jeunes filles noires angoissées par le conditionnel d’une futurité incertaine. Des cheveux, mais également des mains aussi qui s’entrelacent et manifestent dans Their hand comme l’affirme Bell Hooks, que l’amour n’est pas seulement un sentiment mais une pratique. Le travail artistique d’Attandi a ainsi  cette force de s’enraciner dans la quotidienneté de nos gestes, interactions, moments de communions, et d’en révéler leur réalisme magique empreint de nostalgie.

I remember the first time I met Attandi, she talked to me about her graduate memoir on black women’s relationship to care. Few weeks later, we met again at a café in Paris. This day we probably waited a long time  to be served, arguably longer than other customers...

But in reality I didn’t keep any sensation of that waiting. Because if I have to remember my experience of that moment, it wouldn’t be situated in the wait of a breakfast in a Parisian café, but in the space-time that our exchange revealed in the way of a tender vail,  enveloping and protecting us from the rest. I rethought about that moment when discovering Braid me, at that potentiality that the moments between black women give rise to in space-time auspicious at the experience of a  black feminine heterotopia.

Braid me is a performance and photographic series that stages two girls, one with a long unfinished braid and the other at the extremity that braids. Depending on the point of view, the first appears alone, sitting on a tapestry with an endless braid. She reminds me of the fantastic and sonorous image that was created in my head when Attandi told me, still in the café of our second time meeting, showing me her long and thin braids done alone. You know this hair is my shit/Rode the ride, I gave it time / But this here is mine. The result of a long way and still ongoing and often difficult re-appropriation of hair care freed from the gaze of others, hurting hands, and western beauty standards. Rode the ride, I gave it time. There is a certain ambiguity that works Braid me, between the desire of taking care of yourself individually and collectively, but also this feeling of captivity through this endless braid that seems to hold her back. These braided attachments that connect us to our past, which we try to untie in order to give them a new form of life can also be found in her work Crochet me. The hair here overflows with intimate and often silent stories of desire, revolt and communion of young black girls anguished by the conditionality of an uncertain future. Hair, but also hands that intertwine and manifest in Their Hands as Bell Hooks asserts, that love is not only a feeling but a practice. Attandi’s artistic work thereby has this strength to take root in the daily life of our gestures, interactions, moments of communion, and to reveal their magical realism imbued with nostalgia

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Artist: Attandi ︎

Curtator: Amandine Nana ︎